10j pour venir à bout d’un accident industriel majeur
Alerte accident industriel majeur
Nous sommes un samedi, nous décalons à l’aube… Il s’agit d’un accident industriel à 500 km de notre base angevine, une pollution au carrefour de la Loire et l’un de ses affluents.
Une rupture de canalisation malheureuse
Suite à une rupture de canalisation, un flux polluant épais s’est déversé dans la rivière depuis un émissaire présent sous la prairie.
Un premier barrage flottant mis en œuvre par le SDIS* avait parfaitement joué son rôle :
la pollution retenue en sortie de canalisation s’était accumulée sur pas moins de 15 cm d’épaisseur.
*Service Départemental d’Incendie et de Secours
Première intervention par aspiration au tuyau
L’urgence avait nécessité l’intervention par aspiration au tuyau d’une entreprise de pompage locale. Cette technique était la seule disponibilité régionale. Indiscutablement, un tel pompage a permis de résorber une part importante de l’accident industriel, même si l’eau fut aspirée de façon largement préférentielle par rapport au polluant. Ce phénomène s’explique par la différence de densité entre les deux liquides.
Contraints par l’éloignement de la route, les camions de pompage ne pouvaient intervenir qu’à l’embouchure de la canalisation. La rivière, d’une trentaine de mètres de large, restait maculée sur une longueur d’environ 1 km. Aux dires de l’industriel responsable, pas moins de 15 entreprises de dépollution ont été contactées, mais aucune n’était en mesure d’intervenir en urgence. C’est alors grâce au CEDRE* qu’il nous a sollicités.
*Centre de documentation, de recherche et d’expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux
Reconnaissance de la zone sinistrée
Il est 13h30. Accueillis par un élu, plusieurs Officiers sapeurs-pompiers et les représentants de l’entreprise donneur d’ordre pour une reconnaissance des lieux, nous estimons la masse de pollution résiduelle à 3m3, disséminée sur l’équivalent de 3 terrains de foot. S’y ajoutent les déchets végétaux flottants : des branches, troncs, algues souillés…
Cette pollution se présente comme une émulsion pâteuse marron clair, qui s’éclaircit au jaune safran quand elle se libère sur les eaux. Parmi cette bouillie fétide, des boules de graisse bleue diffusent jusqu’à disparaître dans le mélange général. Et toute cette végétation au milieu !
Deux autres barrages en aval, judicieusement installés en double épi par les pompiers, retiennent un même mélange, quoique moins pollué.
Installation immédiate d’un traitement sur site
Sitôt la reconnaissance achevée, nous déployons une remorque de dépollution CMIC-QE. Le traitement de l’accident industriel peut débuter dès la fin d’après-midi. Fonctionnant en automatique 24/24, nos efforts se limitent alors à la surveillance et à la maintenance de l’unité, au déplacement des skimmers.
Enlèvement des végétaux pollués
L’enlèvement des végétaux pollués sous des trombes d’eau est une autre affaire !
Un manuscopique d’une amplitude de 16m nous permet de récupérer les amas pollués inaccessibles ou difficilement embarquables sur les moyens nautiques du SDIS.
Des roseaux parsèment la rive droite de la rivière et ses hauts fonds, emprisonnant la pollution. Sous l’autorité du DOS*, le faucardage de ces végétaux est donc décidé. Pour éviter que la pollution ne dérive par l’effet du vent, 50m de barrages AMA DEPOL sont positionnés avec l’aide des moyens nautiques du SDIS. Les végétaux sectionnés sont ensuite transportés dans une benne étanche, stationnée dans la prairie.
*Directeur des Opérations de Secours
Epandage de tourbe
Durant toute l’opération, nous épandons puis récupérons une tourbe blonde (absorbant naturel). Lorsqu’elle ne peut être récupérée, la tourbe favorise une biodégradation naturelle de la pollution.
Bon vent, bon courant
Deux phénomènes, couplés à l’installation des barrages par le SDIS dès les prémisses de pollution, nous ont été avantageusement favorables :
- D’une part, l’effet de marnage, dû à chaque manœuvre des équipes VNF* sur un barrage à proximité.
- D’autre part, celui du vent, tantôt d’ouest, tantôt sud-ouest, et forcissant de temps à autre.
Les vents ont en effet maintenu les polluants et végétaux flottants contre la rive droite, ainsi seule à avoir été contaminée. Le marnage a réessuyé cette même berge.
* Etablissement public administratif Voies Navigables de Franc
Fin d’intervention et repli
Après 15 jours intenses, en accord avec le DOS, les moyens nautiques du SDIS replient à berge l’ensemble des barrages. Nos équipements, barrages et cellule de dépollution, sont acheminés sur le site de l’accident industriel pour nettoyage.
Le pompage de l’unité et des cuves de stockage des déchets liquides issus de notre traitement ont permis de recueillir un volume de déchet sensiblement identique à celui observé lors de notre reconnaissance sur la rivière. Ajoutés aux eaux de rinçage des équipements, ce sont 4m3 de polluant et 15m3 de végétaux souillés qui sont évacués.
L’eau de la rivière pompée et traitée au sein de notre unité mobile a quant à elle été reversée dans la rivière au fur et à mesure du traitement. Ce sont ainsi des centaines de milliers de litres traités sur site que l’on évite de transporter et traiter en centre agréé.
10 jours plus tard, la prairie sera inondée, et les vaches qui nous tenaient compagnie évacuées. Fort heureusement dépouillée de son manteau de barbouille, la rivière ne souillera pas le rivage. Une intervention rapide et efficace aura ainsi permis de limiter drastiquement les conséquences de cet incident industriel.
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